Eh bien non, une seule asperge posée sur une assiette, ne fait pas un plat. Aussi bonne soit-elle… Et qu’elle soit parsemée d’herbes « sauvages » n’ajoute malheureusement rien à l’affaire. Au contraire! C’est pourtant ce qui m’a été servi dans un restaurant encensé par la critique et dont je tairai le nom: d’abord parce que ce billet n’est pas une critique au sens où on l’entend habituellement, ensuite parce que cet échantillonnage donnerait plutôt envie d’aller plus loin (d’où les louanges). C’est donc à cette mode qui devient ridicule que je m’en prends. Objectivement, cependant, il n’est pas sûr — et c’est le problème de cette cuisine et des menus dégustation en général — que cela tienne la route sur la distance. C’est donc doublement une cuisine de la frustration. Serait-elle aussi celle de l’impuissance? De l’incapacité d’imaginer des plats complexes qui puissent tenir l’imaginaire en éveil au-delà d’une bouchée?
On peut le craindre: toute cette cuisine que l’on pourrait qualifier de « cuisine à la mandoline » n’a peut-etre pas grand-chose à dire au-delà de ce que montrent ses assiettes. C’est joli, c’est amusant, et on passe — vite — à autre chose.
D’où, peut-être, l’intérêt des plantes sauvages: à défaut d’apporter véritablement quelque chose (d’ailleurs, on les met toutes), elles retiennent l’attention. Où donc les cuisiniers parisiens trouvent-ils donc toutes celles qui parsèment leurs plats? Entre quels pavés (qui n’existent plus)? Dans quelles pelouses de squares? Et comment fait-on en hiver? Perdu au fin fond de l’Aubrac, cela se conçoit. Voire même à Copenhague… Mais à Paris? Toute cette cuisine des herbes coriaces et des fleurettes sans plus aucune justification, mises là simplement comme signes de la nature, devient lassante. Quand passera-t-on, enfin, à autre chose?